C’est le directeur de l’Agence régionale de santé du Grand Est qui parle, dans L’Est républicain : « Pas de raison de remettre en cause le Copermo pour le CHRU [Centre hospitalier régional universitaire] de Nancy. Le dossier devait être examiné début juin. Nous aurons quelques semaines de retard mais la trajectoire restera la même en faisant le pari du développement de la chirurgie ambulatoire et de la rationalisation des installations en passant de 7 sites à un seul. C’est une vision très exigeante . » Très exigeante ? Christophe Lannelongue manie l’euphémisme. En effet, le Copermo (acronyme typique de la Novlangue signifiant Comité interministériel de la performance et de la modernisation de l’offre de soins hospitaliers) prévoit la suppression de 598 postes dans les cinq ans et la fermeture de 174 lits. Dans le Grand Est, donc, précisément là où la pandémie met en lumière le criant manque de lits hospitaliers ! Pour Lannelongue, « pas de raison » donc. Est-il possible d’être aussi aveugle ?
Réponse du CHRU de Nancy : « Totalement mobilisées, les équipes ont augmenté de manière exponentielle les capacités en lits de réanimation, passant de 70 à 150 lits ouverts au service des malades. Dans ce contexte, la position de l’ARS Grand-Est énoncée ce matin dans la presse régionale, évoquant la suppression de 598 postes et 174 lits, apparaît comme totalement décalée. Évoquer de tels chiffres à l’heure où les équipes vont au bout de leur investissement personnel est à la fois déconcertant et indécent. Cela témoigne d’une absence de compréhension des réalités de terrain et d’empathie par rapport aux soignants, ce qui ne manquera pas de les blesser en plein combat. (…) Cette crise planétaire que nous affrontons nous imposera collectivement une révision complète de la politique de santé dans ce pays depuis le début du siècle, pour l’adapter aux enseignements que nous devrons en tirer. Le Copermo tel que nous l’avons connu avec ses normes, abaques et doctrine n’est de toute évidence plus adapté. »
Réaction du ministre des Solidarités et de la Santé, Olivier Véran, sur Twitter: « L’heure viendra de tirer les enseignements de cette crise sans précédent et de refonder notre hôpital. Tous les plans de réorganisation sont évidemment suspendus à la grande consultation qui suivra.” Allons bon, une grande consultation… Alors que les personnels soignants sont en lutte depuis plus d’un an et qu’on les a écoutés jusqu’à présent à grands coups de gaz lacrymogènes et de matraques ! En outre, puisque les mots ont un sens, que signifie « suspendre » ? Réponse du dictionnaire Larousse: « Interrompre momentanément le cours d’une action, de quelque chose; remettre à une date indéterminée ce qui était prévu« . Inutile de préciser qu’il y a lieu d’être sceptiques quant à l’abandon de l’idéologie mortifère qui met notre système de santé à genoux.