
Gérald Darmanin, l’homme qui profitait de sa position pour obtenir des faveurs sexuelles, incarne politiquement, de son poste stratégique de ministre de l’Intérieur, le virage à l’extrême droite de la Macronie. La République en marche et le Rassemblement national apparaissent dès lors comme des alliés objectifs : Macron ne gagnera la présidentielle qu’en se présentant face à Marine Le Pen ; son intérêt bien compris est par conséquent de faire monter le RHaine RN. Comment ? En popularisant ses thèses, en les plaçant sciemment au coeur de l’actualité du débat politique, en les reprenant à son compte. Comme Sarkozy en son temps, Macron ne craint plus aujourd’hui, par lieutenants interposés, de s’approprier les thèmes et le langage de l’extrême droite. Marlène Schiappa l’avait amorcé, Darmanin met le turbo. Il y eut, à propos des violences policières, l’abominable « Je m’étouffe », suivi ensuite de « l’ensauvagement ». Formule signature de l’extrême droite, comme on parle en gastronomie de plat signature, popularisée par La Pen. Dernière sortie en date du ministre de l’Intérieur : « Aucune communauté sur le sol de la République ne fait sa loi ; c’est la police de la République, la gendarmerie, les forces légitimes d’intervention des forces de l’ordre qui font la loi dans notre pays. » Absolument pas, enfin ! Le parlement fait la loi, la police l’applique, nuance. Bonnet d’âne en droit constitutionnel à ce ministre qui oublie la séparation des pouvoirs entre exécutif, législatif et judiciaire, principe cardinal de la République. Inquiétant, mais passons.

Comment le porte-parole du Rassemblement national réagit-il ? « Il parle comme nous parlons depuis des décennies, si les mots étaient magiques je serais satisfait, déclare Laurent Jacobelli. Malheureusement les mots ne sont pas magiques. Il y a les actes derrière ». Darmanin « fait le même constat que nous, qu’il y a un lien entre immigration, demande d’asile et insécurité. Il y a un lien entre immigration incontrôlée et ensauvagement. Il a passé une étape, maintenant il va falloir qu’il passe l’étape des actes. » Soyons juste, c’est faux : Darmanin n’établit pas formellement de lien. Mais il y a la petite musique. On sait que Macron a coutume de caresser les chasseurs dans le sens du poil, mais voilà qu’il avalise désormais le braconnage, sur tes terres de l’extrême droite. Et il appellera ensuite les castors à faire barrage. Tandis que l’on espère encore, dans les salons de Montretout, que l’électeur finira par préférer l’original à la copie.