Sonia Mitralias, citoyenne grecque membre du Comité pour l’annulation de la dette du Tiers monde, s’est exprimée lors de la Conférence de Londres contre l’austérité organisée par la Coalition of Resistance, le 1er octobre dernier, et le blog Etat critique reproduit son témoignage : « Je viens de Grèce, un pays en train d’être saigné à blanc et détruit par ceux qui prétendent le sauver, le Fonds monétaire international, la Banque centrale européenne et la Commission européenne. Après l’adoption, l’application et surtout… l’échec des quatre traitements de choc appelés memoranda, et l’application actuellement du cinquième, qui est le plus dur et inhumain, la Grèce n’est plus le pays qu’on connaissait : maintenant, les rues se vident après le coucher du soleil, les restaurants cherchent désespérément des clients et les magasins des rues commerçantes désertées tombent en ruine. Le pourquoi de cette métamorphose est donné par ces quelques chiffres : les salariés et les retraités ont déjà perdu 30 à 50% et parfois même plus de leur pouvoir d’achat. Ce qui a comme conséquence qu’environ 30% des magasins ou 35% des pompes à essence sont fermées pour toujours. Que le chômage atteindra probablement 30% l’année prochaine. Qu’on aura 40% de moins d’hôpitaux et de lits d’hôpitaux, ou que l’Etat grec se trouvant, il y a quelques jours, dans l’incapacité de fournir des livres scolaires à ses écoliers, les invite à en faire des photocopies (!), etc., etc. En somme, que la faim, oui la faim, commence à faire son apparition dans les grandes villes tandis que les suicides se multiplient dans un pays plongé dans le stress et le désespoir… » Sonia Mitralias insiste sur « l’importance de l’enjeu : la Grèce constitue actuellement un cas test mondial, un véritable laboratoire planétaire dans lequel sont testées les capacités de résistance des peuples aux plans d’ajustement structurels aux temps de la grande crise des dettes publiques. En somme, tous les regards, tant de ceux d’en haut comme de ceux d’en bas, sont tournés jour après jour vers ce petit pays européen qui a la malchance d’être devenu le cobaye mondial du néolibéralisme le plus cynique. »
Un autre éminent membre du CADTM, le politologue belge Eric Toussaint, docteur en sciences politiques des Université de Liège et de Paris VIII, n’est pas moins clair : « on pourrait dire que les prêts de la troïka (Commission européenne, BCE, Fonds monétaire international) à la Grèce sont des prêts odieux parce que ces institutions, avec derrière elles les gouvernements allemand et français, profitent d’une situation de détresse de la Grèce – qui depuis mai 2010 n’a plus accès à des emprunts dépassant un an – pour prêter à Athènes à du 5,5%. En contrepartie, ils exigent de la Grèce qu’elle mette en œuvre une batterie de mesures d’austérité. Mesures qui dans certains cas sont des violation des droits économiques et sociaux reconnus par l’Organisation internationale du travail, par exemple. Et, de plus, ces mesures ont un effet contraire à l’objectif officiel recherché, c’est-à-dire une amélioration de la situation économique rendant soutenable le paiement de la dette. Or, on constate que cela crée une récession qui réduit les recettes fiscales et conduit à de nouvelles mesures d’austérité. Lesquelles ne permettront de toute façon pas à la Grèce de dégager dans son budget des marges suffisantes pour rembourser des montants grevés de taux d’intérêts trop élevés. Avant cela, on a eu toute une série d’institutions financières françaises, allemandes, belges, qui au début de la crise financière se finançaient à des taux de 0,25% auprès de la Fed ou de 1% auprès la BCE puis qui prêtaient très massivement à la Grèce - on constate une augmentation de 80 à 120 milliards d’emprunts, soit 50% en pleine période de crise. Là, il y a des marques d’illégitimités parce que les fonds qui étaient prêtés aux banques ne devaient pas servir à cela mais à éviter un credit crunch, que ces banques n’ont pas respecté les règle de prudence en matière de solvabilité des emprunteurs et pire les ont encouragés à se surendetter. Et si on retourne encore plus loin, on rappellera que les JO devait coûter à la Grèce 1,4 milliard et en ont coûté près de 20. Or, il y a des entreprises étrangères, comme Siemens – qui font l’objet de poursuites judiciaires – qui ont versé des pots-de-vin énormes aux autorités politiques de l’époque. Enfin, il y a les dépenses militaires énormes de la Grèce, qui représentent 4% du PIB. Les Américains, les Allemands et les Français sont les principaux fournisseurs militaires, et dans un premier temps, on a seulement demandé à la Grèce de couper dans les dépenses sociales, parce qu’il fallait qu’elle honore les commandes militaires à Berlin et à Paris. »
On parle de dépenses militaires ? Lisons alors Le Monde du 19 octobre, qui titre Paris s’apprêterait à vendre des frégates à Athènes, Berlin proteste : « Les relations franco-allemandes vont-elles connaître une nouvelle période de tensions, à l’approche du sommet européen du 23 octobre ? Selon le Spiegel, la France veut vendre à la Grèce des frégates et proposerait au pays surendetté un tarif préférentiel et un délai de paiement. Il s’agit de deux à quatre frégates furtives du groupe d’armement naval DCNS qui seraient vendues avec une remise de 100 millions d’euros si Athènes décide de les garder au bout de cinq ans. Dans le cas contraire, la Grèce devrait les rendre à la marine française. Les concurrents allemands du constructeur français, qui ont tenté pendant des années de remporter ce contrat, critiquent cet accord. Dans un courrier au gouvernement allemand, un dirigeant du groupe ThyssenKrupp déplore que l’achat des frégates soit en partie financé par les contribuables allemands, car, selon lui, la Grèce, dépendante de l’aide du FMI et de l’UE, pourrait devoir restructurer sa dette. Un abandon de certaines créances grecques semble de plus en plus probable. [En effet !] Si cela intervient et que la Grèce est sauvée par des fonds de secours européens, le scénario de Thyssen se réaliserait. Les contribuables allemands garantiraient une part des dépenses du gouvernement grec et, ainsi, paieraient pour une partie de l’achat des frégates. » On voit surtout que ce qui embête Berlin n’est pas qu’on saigne à blanc un pays pendant qu’on lui vend des armes, mais qu’Athènes ait choisi des armes françaises ! Et pendant ce temps-là, qu’impose le cinquième memoranda dont parlait plus haut Sonia Mitralias ? Résumé par L’Humanité : « Un seul député socialiste, l’ancienne ministre du Travail Louka Katseli, amie proche du Premier ministre, a refusé d’approuver une disposition du projet restreignant les négociations salariales collectives. Elle a été immédiatement exclue de son groupe parlementaire. [Rappelez-nous leur couleur politique ? Ah oui, « socialistes »…] Les dirigeants européens et le FMI attendaient ce vote pour débloquer 8 milliards d’euros de prêt supplémentaires. Le texte prévoit une réduction de 20% des salaires de la fonction publique, abaisse le seuil du niveau d’imposition et autorise le licenciement des fonctionnaires. Pendant que le parlement finissait d’achever les services publics grecs, au moins 125 000 manifestants otestaient dans la rue. Il y a eu d’importants heurts contre la police, mais aussi entre manifestants. Le service d’ordre du syndicat communiste PAME, qui souhaitait une manifestation pacifique, s’est opposé à de nombreux révoltés cagoulés armés de bâtons et de cocktails Molotov. La police a ensuite chargé les manifestants. Les combats ont fait au moins 74 blessés, et un homme est décédé d’une crise cardiaque dans l’agitation de la manifestation. » Le pire est à venir, en Grèce comme ailleurs, en France, partout. Et l’on se prend à l’espérer.
Ce qui se passe en Grèce est effectivement décisif. En guise de compléments partiels :
• On peut d’autant moins s’étonner de la volonté du KKE et du Pame (le P »c » et son syndicat) de contrôler les manifestations, y compris par la force, que leur « rôle dirigeant » est désormais contesté, non seulement dans la rue, par le choix de l’affrontement à l’état, mais par d’innombrables initiatives de base (comités de chômeurs, assemblées de quartiers) dont des tentatives syndicales, voir « Retour à la base – Méditations sur le renouveau du syndicalisme grec » (http://www.cip-idf.org/article.php3?id_article=5876)
• La question de la dette « publique » ne peut plus être dissocié de celle de la dette individuelle et intime lorsque l’on nous explique que chaque enfant qui nait en France le fait avec 16 000 € de dettes, lorsque le fait de recevoir le RSA va se traduire par l’imposition de 7 heures de travail hebdomadaire, lorsque les retraités sont désormais eux aussi pointé du doigt comme des « assistés parasites » qui profitent de la collectivité (cf lors du dernier mouvement pour les retraites), voir à ce sujet « Dette objective et dette subjective, des droits sociaux à la dette » (http://www.cip-idf.org/article.php3?id_article=5782)
Tout ça me rappelle une autre époque. Je bossais en Hongrie l’année de la chute du mur de Berlin. Et me demandais chaque jour ou presque comment le système allait encore pouvoir tenir un semaine ou un mois de plus…
Vente d’arme – avec quel(le)s intermédiaires, consultants, dérivation politique ? – VS morale illégitime.
Notre ami le Roitelet élyséen vient de prêcher notre sacrifice devant un Pernaud tout petit dans sa culotte Ricard et un Calvi plus que jamais fidèle à son patron Lagardère.
Il y a loin de la coupe à la joie, des Indignés à une possible révolte générale renversant l’ordre auto-institué.
La recette est partout demandée, mais partout triomphent la peur et le repli, l’attente et l’exaltation des annonces, faute du dynamisme des coordinations massives.
Et les autres qui ne lâchent rien…
Ainsi, hier soir, à l’heure de grande passivité télévisuelle, Poutou avocat des pauvres, des réprouvés, des révoltés, ouvrier et porteur du flambeau NPA s’est fait marcher dessus par deux journalistes de cour – Pulvar et Polony -, portant l’impeccable griffe mode du PAF.
Propres, éduquées, multicolores, habitus grand-bourgeois, ethos politique certifié par Dupont-Aignan et Montebourg, habillées déstructuré mais de bon ton, le verbe pédant, l’oeil mouillé et le petit doigt en l’air pour baver sur le révolutionnaire à la rhétorique entravée par l’usine et impressionné par les paillettes.
L’essayiste Onfray à gouté à la curée, n’hésitant pas à user de son discours de pro pour exiger réponse de toutes les contradictions de la gauche depuis au moins 20 ans, du haut de ses tirages à cinq zéros et de sa table ouverte dans tous les médias. Onfray qui fut un temps encarté au NPA, et se dit encore aujourd’hui « compagnon de route ». Qu’est-ce que ce serait s’il ne l’était pas…
Sans parler du dénommé Ruquier, beauf à 20000 euros/mois qui posait une banderille de temps en temps sur le corps vivant de la politique au plus haut, celle délivrée par un citoyen d’en-bas simple porte-parole de valeurs, d’idées et de combats pour un avenir collectif, dans un communauté d’égaux délivrés des ravages causés par la domination capitaliste.
Ce cirque sanglant baignait, naturellement, dans un mépris généralisé porté par cette caste sous projecteur envers tout ce qui n’est pas habitué à flamber en plateau et ne vit pas largement à l’abri du besoin, en cultivant un dandysme avec renforts aux genoux et lèvres refaites.
Bref, y a du boulot…
La Grèce souffre au même titre que les pays du tiers Monde qui se sont retrouvés à ne plus pouvoir payer leur dette, étranglée par les puissances financières qui empruntent de l’argent à 2 ou 3% pour lui prêter à 16%.
Et ceci risque de nous arriver, peut-être après l’Espagne, le Portugal, l’Irlande ou l’Italie mais toujours pour les mêmes raisons: des gouvernements qui ont fait n’importe quoi mais non sans favoriser au passage toute une frange de proches qui ont su profiter de la situation.
Sans revenir sur les points cités précédemment, le déséquilibre des richesses au sein même des pays en difficultés est certainement également à traiter. Comment le FMI peut-il prêter de l’argent à des Etats dont il sait pertinemment que la corruption conduira les sommes prêtées vers des paradis fiscaux ?
Comment le gouvernement français peut-il parler de plan d’austérité (même s’il ne le nomme pas) alors qu’il a distribué des avantages à tout va (cadeaux aux entreprises, niches fiscales, controles insuffisants defraude fiscale).
En France, en Grèce comme ailleurs, les causes donc les solutions à chercher sont aussi au sein même des pays en recherchant un équilibre des richesses à mesures humaine et non avec les excès toujours croissants que nous connaissons.
[…] PLUME DE PRESSE : Dans le blog offensif d’Olivier Bonnet, propos instructifs de Sonia Mitralias, citoyenne grecque membre du Comité pour l’annulation de la dette du Tiers monde. En Grèce, l’inquiétude monte encore : «Le chômage atteindra probablement 30% l’année prochaine. On aura 40% de moins d’hôpitaux et de lits d’hôpitaux (…) L’Etat grec se trouve déjà dans l’incapacité de fournir des livres scolaires à ses écoliers et les invite à en faire des photocopies. Et la faim, oui la faim, commence à faire son apparition dans les grandes villes tandis que les suicides se multiplient dans un pays plongé dans le stress et le désespoir». […]
Ce qu’il y a derrière c’est que des humains cherchent à être très riches pour des dizaines ou des centaines de générations. Il y a ceux qui y sont déjà arrivés et ceux qui cherchent à y arriver. Le monde leur appartient, et tout est fait au service de ce mécanisme là. Et ils expliquent à l’écrasante majorité de la population mondiale qu’elle s’est trop gavée, et qu’il faut se contenter de toujours moins. Même De Closets, qui n’est pas un bolchévik, dit qu’en France il y a eu 60 milliards d’Euros de cadeaux fiscaux -sous Sarkozy-par an et que c’est du délire.
Une grande majorité de ceux qui vont en avoir toujours moins et une petite minorité de ceux qui n’en ont jamais assez sont sur le même bateau, du point de vue de l’histoire de l’humanité le choix est vite fait: il faut sauver les premiers.
Et d’un point de vue pratique, les premiers crèveront de faim par milliers, pendant que les second continueront à se gaver, bien protégés par des esclaves à qui ils fourniront tout juste les moyens de ne pas crever de faim.
Je sais pas pourquoi, ça me rappelle vaguement quelque chose.
[…] La Grèce, stress test de la résistance populaire à la dictature financière […]
[…] La Grèce, stress test de la résistance populaire à la dictature financière […]
[…] La Grèce, stress test de la résistance populaire à la dictature financière […]