« Moi je crois à la République exemplaire. La République exemplaire n’est pas la République qui fait zéro faute, ça n’existe pas de faire zéro faute, on en fait tous. » Emmanuel Macron avait concédé cela le 25 juillet 2018, rattrapé par la patrouille de l’affaire Benalla. Heureusement qu’il ne visait pas le zéro faute ! Parce qu’où en est-on aujourd’hui ? La liste des hauts personnages de la Macronie mis en cause pour des faits graves est longue comme le bras. Douze, déjà, avant les deux petits nouveaux de la bande, Olivier Dussopt et Gérald Darmanin, ministres respectivement coupables – ils reconnaissent les faits – de « corruption » et « prise illégale d’intérêts » pour le premier, et de « trafic d’influence » et « abus de faiblesse » pour l’autre – la qualification de « viol » n’ayant que très peu de chance d’être reconnue (lire notre article-fleuve, « Viol » ou pas, Darmanin est coupable : l’ignominie en marche.
De la « moralisation » à la « confiance »

Avant d’en venir à l’impressionnante liste des mis en cause depuis le début du mandat jupitérien, prenons de la hauteur en nous interrogeant sur le concept d’exemplarité en politique. Beligh Nabli, maître de conférences Habilité à diriger des recherches (HDR) en droit public à l’Université Paris-Est Créteil et auteur de l’ouvrage La République du soupçon. La vie politique au risque de la transparence (Cerf, 2018), nous éclaire : « L’un des faits nouveaux dans le processus de nomination sous la Ve République, c’est le lien direct avec la question de l’exemplarité, analyse le juriste. Depuis la mi-mandat de François Hollande, il existe un contrôle prudentiel et préalable sur des candidats potentiels à la nomination. C’est totalement nouveau et c’est lié précisément à la montée en puissance des questions liées à l’exemplarité. Le plus intéressant, c’est que ce qui est apparu en pratique a été formalisé et a été consacré par la loi, notamment la première loi adoptée sous le quinquennat Macron, qu’il voulait d’abord appeler les « Lois sur la moralisation de la vie politique », et qu’il a finalement nommée « Lois pour la confiance dans la vie politique ». Ces lois prévoient que le président de la République peut demander, avant la nomination des membres du gouvernement, des contrôles préalables sur leur situation patrimoniale et sur d’éventuels conflits d’intérêts. Ce qui est intéressant, c’est que Macron a fait sauter le mot « moralisation » pour le remplacer par le mot « confiance », précisément ! Et si c’est une question de confiance, ça ne peut pas être une question de respect des règles. Sinon, on l’aurait appelée la « Loi sur le respect de l’Etat de droit par les responsables politiques ». En fait, l’exécutif actuel n’a pas du tout intégré dans sa plénitude les implications de l’exemplarité en politique. (…) Ce qui est sûr, en tout cas, c’est que le président Macron ne pourra plus mobiliser la thématique de l’exemplarité lors de la prochaine présidentielle. C’est le prix à payer, car la barque commence à être un peu chargée. » Chiche ?

Comment la Macronie flatte le « tous pourris »
En fait de « barque un peu chargée », un article du Monde de juillet 2019 énumère les ennuis judiciaires de douze personnalités macronistes : un président de l’Assemblée nationale, quatrième personnage de l’État (Richard Ferran), sept ministres (François Bayrou, Sylvie Goulard, Marielle de Sarnez, François de Rugy, Françoise Nyssen, Laura Flessel, Muriel Pénicaud), un Haut-commissaire (Jean-Paul Delevoye), un secrétaire général de l’Élysée (Alexis Kohler), un conseiller spécial de Macron (Ismaël Émelien) et un chargé de sécurité à l’Élysée (Alexandre Benalla). La palette offerte explore toutes les nuances de l’infamie politique : conflits d’intérêts, prise illégale d’intérêts, abus de confiance, escroquerie, détournement de fonds publics, trafic d’influence, corruption passive, faux et usage de faux, infraction aux règles d’urbanisme, fraude fiscale, délit de favoritisme et violence par personne chargée d’une mission de service public. Ajoutons désormais Gérald Darmanin et Olivier Dussopt, ce qui nous donne neuf ministres. Chiraquie, Sarkozie, Hollandie, Macronie : le trait d’union est tracé et le « nouveau monde » promis par l’imposteur de l’Élysée cumule toutes les tares de l’ancien.